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18 février 2019

La fille du traître

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"Elle observa en silence le vieil homme et sa femme dodue. Tous les trois devaient être en train de parler du menu dans leur russe incompréhensible. Il y avait une complicité naturelle entre eux. Ils étaient bien ensemble et se faisaient mutuellement confiance, ce qui la mettait en colère. Son père les avait trahies, elle et sa mère, au profit de ces deux-là. Elle ne devait jamais l'oublier. Elle sentit sa dureté ressurgir en même temps que sa colère d'avoir été trahie, ce qui était plutôt rassurant".

Dans les années 80, juste avant la chute du mur, John Arnborg, agent de renseignement danois est exfiltré d'Allemagne de l'Est où il était emprisonné depuis quatre ans. Sa femme et sa fille, Laila, le retrouvent avec soulagement. Pas pour longtemps. John va repartir en Russie cette fois, trahissant son pays. Accessoirement, il a caché l'existence d'une seconde famille là-bas, une femme, Alla et un fils, Tor.

L'histoire se poursuit quelques décennies plus tard. Laila a dû grandir avec l'abandon et la trahison de son père. La trentaine bien avancée, elle vivote dans un camping dont elle est propriétaire sur la côte danoise. Elle est en difficulté depuis que son compagnon l'a quittée, lassé par son mauvais caractère, ses sautes d'humeur et son peu de sociabilité. Laila a auparavant participé à deux missions en Irak comme traductrice ; elle parle couramment arabe. Elle en est revenue profondément marquée par ce qu'elle a vu.

En Russie, son père est maintenant un vieil homme, malade de surcroît. Il vit à Ples, un charmant village typique au bord de la Volga, cher au peintre Isaac Levitan. Il voudrait reprendre contact avec Laila et réunir ses deux enfants. Mais il se sait toujours sous surveillance et il doit ruser pour y parvenir. Il souhaiterait revenir également au Danemark. Il est préoccupé par le sort de son fils, Tor, combattant de choc, gravement blessé lors d'une mission.

Sur cette trame, l'auteur mêle brillament une histoire de famille à une situation géopolitique compliquée, celle de la Russie de Poutine. L'équilibre est parfait entre les deux et c'est un roman qui se dévore avec un intérêt grandissant.

John va réussir à faire venir Laila en Russie, via deux vieux espions qui reprennent du service. Laila poursuit un but en y allant, loin des aspirations de son père. Elle découvre un pays aux antipodes du sien et surtout un demi-frère dont elle n'a que faire. De son côté, Tor ignorait l'existence de sa soeur danoise, les retrouvailles sont donc pénibles. Tor se présente comme journaliste, alors qu'il travaille dans une ferme à trolls.

Peu à peu, ils vont faire connaissance, sous l'oeil de John, qui n'ose guère s'en mêler. Laila ne le ménage pas et explose souvent de colère en repensant au passé. Par ailleurs, on ne change pas un agent double et il fréquente les hautes sphères russes, préoccupées par la politique de Poutine, persuadées qu'après l'Ukraine il s'attaquera aux pays baltes, plongeant à nouveau le pays dans le chaos.

Je n'en dirai pas plus ; tout ce qui concerne la politique est solidement documenté et fait froid dans le dos. Les personnages sont particulièrement fouillés, on passe de l'un à l'autre en approfondissant leurs sentiments, leurs réactions et en ayant peur pour eux. Tor et Laila ont en commun de ne pas avoir froid aux yeux et de ne pas s'en laisser conter.

Une histoire forte et bien construite, à ne pas manquer.

"En apparence, Ples ressemble peut-être à une carte postale russe, mais dans ce pays corrompu, malgré tout grandiose et fascinant, la tradition veut que la politique et les stratégies s'élaborent loin des oreilles du Kremlin. Aujourd'hui, l'argent a remplacé Dieu en Russie, c'est l'idéologie qui maintient le Président au pouvoir. L'argent et le nationalisme russe, qui aveugle le peuple. Avec la contribution bienveillante de l'Eglise Orthodoxe, c'est là que réside le pouvoir dans la Russie agressive actuelle".

Merci à Masse Critique de Babelio et aux Editions Gaïa

Masse critique

L'avis de Alex Cuné

Leif Davidsen - La fille du traître - 429 pages
Traduit du danois par Frédéric Fourreau
Editions Gaïa - 2019

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Commentaires
U
Très intéressant dis-donc !
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Z
Tentant
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A
Ton article donne envie de lire ce livre. Rattraper une trahison, est une tâche bien difficile.
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E
Je le retiens, espionnage et Russie, je ne suis pas sûre d'accrocher mais il faudrait que j'essaie… J'ai de grosses lacunes sur l'Histoire de ce pays, d'après toi est-ce que je vais réussir à suivre ?
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S
si c'est un roman d'espionnage je passe mon tour, je n'arrive pas à accrocher généralement
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