Entre deux mers
"Toute la journée du lendemain se déroule dans et autour du cirque des Boutières, entre le Mézenc et le Gerbier-de-Jonc. De plusieurs kilomètres de diamètre, le cirque, dont le fond est constitué de grasses prairies accidentées, coupées de petites failles et de bourrelets herbeux, est constellé de sucs qui saillent sur ses pentes et l'entourent sur ses bords. Il mérite de figurer au Panthéon des plus beaux sites de notre pays qui n'en manque pas, et constitue le cinquième de mes coups de coeur paysagers entre deux mers, après le cap Sizun, la région de Guerlédan (en Bretagne), la Brenne et la vallée cristalline de la Creuse. Ma compagne et moi progressons, fascinés, d'abord sur le plateau en contournant le cirque à nos pieds, puis nous rejoignons par les pelouses fleuries sa partie basse avant de remonter sur son bord sud-est, à quelque distance du féérique mont Gerbier-de-Jonc vers lequel nous nous dirigeons dans une sorte d'hypnose."
Après une première diagonale qui l'a mené des Ardennes au pays basque en 2013 (Pensées en chemin), Axel Kahn entreprend une deuxième diagonale l'année suivante, cette fois-ci de la pointe du Raz jusqu'à Menton. Plus de 2000 kilomètres en perspective et un trajet plus dur physiquement, puisqu'il devra traverser des zones montagneuses.
L'organisation est la même, des étapes d'au moins trente kilomètres, des hébergements réservés à l'avance, des rencontres prévues ou imprévues et une curiosité insatiable des paysages, des habitants, de la vie économique, de l'histoire, de l'art etc ...
L'auteur m'a paru moins pessimiste que dans le premier voyage, il traverse des régions moins ravagées par la crise industrielle et les initiatives ne manquent pas à petite échelle pour redynamiser "le terroir". Il est souvent époustouflé par la beauté de certains paysages que l'on ne peut admirer qu'en allant à pied et en s'écartant des sentiers balisés, ce qu'il fait souvent, faute de chemins entretenus. Il ne cherche pas la facilité non plus, décidant régulièrement d'allonger sa route pour éviter les trajets trop rectilignes.
Il n'est pas parti tout-à-fait seul, il a accepté d'emporter une mascotte, une peluche qu'il appelle sa princesse, emblème des Jeux Equestres Mondiaux qui se déroulent la même année et dont il est un ambassadeur. Il dialogue avec elle et je l'ai trouvée un peu trop envahissante par moment.
Le sous-titre "voyage au bout de soi" n'est pas usurpé. C'est un homme de soixante-dix ans qui se met en route. Même s'il est relativement en forme, il outrepasse à plusieurs reprises ses possibilités physiques, faisant fi de chutes et de douleurs, notamment aux genoux, ce qu'il paiera au retour. C'est un homme qui s'interroge aussi sur la meilleure manière de vivre les années qui lui restent en continuant à être heureux.
Un livre qui peut intéresser autant les randonneurs que les sédentaires, tant il est riche d'expériences.
Le site d'Axel Kahn
Axel Kahn - Entre deux mers - 256 pages
Le Livre de Poche - 2016