Le Café de l'Excelsior
"Va donc petit, je te pardonne, mange la vie car c'est du sucre à ton âge !".
Très court texte consacré à son grand'père par le narrateur, ce roman évoque la nostalgie des trois années passées dans son café, sous son affectueuse protection.
Les parents de l'enfant sont morts dans un accident de voiture, et il a été confié au grand-père avec une certaine méfiance de la part de l'administration.
L'auteur décrit des cafés comme il n'en existe plus, c'était avant l'aseptisation générale et c'est un bonheur que cette galerie de portraits de gens simples et d'un lieu hors d'âge, magique aux yeux de l'enfant.
"L'endroit formait une enclave oubliée contre laquelle les rumeurs du monde, et ses agitations, paraissaient se rompre à la façon des hautes vagues sur l'étrave d'un navire".
Le grand-père abuse un peu trop de la bouteille, ce qui ne l'empêche pas d'inculquer des principes à l'enfant et la vie s'écoule entre l'école et le bistro, ponctuée des menus évènements qui font le quotidien.
Rien d'extraordinaire dans ce récit, mais il a le charme indéfinissable des époques révolues. On y trouve une grande pudeur de sentiments et la trace des chagrins irréparables. J'ai beaucoup aimé.
"Quand je contemplais Grand-Père durant les longues siestes du cellier, je remontais à ses cotés le cours d'un temps dans lequel il n'était plus depuis des lustres. A quelques pas de nous, le cliquetis apaisé des verres dans le bistro témoignait pour moi d'un décalage inespéré, et quand je posais ma petite tête de moineau contre la grosse chemise de laine, et sentais tout à la fois le parfum de bois brûlé, le souffle de vin, le soulèvement mesuré de la poitrine, j'embarquais pour un voyage dans une géographie chaleureuse, sans crainte ni redoute, au terme duquel, moi-même cédant au bon sommeil, je retrouvais la tiédeur tendre, enserrante et confuse, du réconfort premier".
Merci Nanne
L'avis de Anne Bellesahi Clara Lounima Sylire Yv
Philippe Claudel - Le Café de l'Excelsior - 84 pages
Le Livre de Poche - 2007