L'oiseau canadèche
Deux bonheurs de lecture coup sur coup, de quoi me plaindrais-je, je vous le demande ? Je suis passée d'une charmante relation grand-mère petit-fils, à une histoire grand-père petit-fils carrément hilarante.
Jake, vieil anar de 80 ans, ancien bourlingueur, marié quatre fois, se croyant immortel grâce à un breuvage distillé par ses soins et nommé "vieux râle d'agonie" recueille Titou, cinq ans, qui vient de perdre sa mère.
Jake ne supporte aucun contrainte et vit quasiment en autarcie. Il est assez déjanté il faut bien le reconnaître et les rasades de "vieux râle d'agonie" qu'il ingurgite ne sont pas faites pour le pondérer. Titou lui est obsédé par les clôtures et en installe partout où il peut.
"Si les similitudes des deux hommes étaient rares, elles avaient beaucoup de fond : elles reposaient sur l'amour émerveillé qu'ils éprouvaient l'un pour l'autre, sur une gentillesse qui allait bien au delà de la simple tolérance : un accord du sang qui touchait le coeur de l'un comme de l'autre."
Arrive dans ce quotidien bien rôdé, un caneton, le fameux oiseau canadèche. Pourquoi ce nom ? Désolée, il faudra lire le roman pour le savoir. Le caneton deviendra une cane colvert presque obèse, légèrement alcoolique et surtout un membre à part entière de la famille exprimant ses sentiments de manière aussi vigoureuse que les humains.
Il y a un méchant dans l'histoire, un vieux sanglier Cloué-Legroin, qui aura un rôle déterminant et inattendu. D'autres personnages savoureux passent en pointillé, les ex-femmes de Jake, un indien énigmatique Johnny sept-lunes. Le tout est très très jubilatoire, le langage est direct et fleuri, j'ai même eu un fou-rire irrépressible à la vision de Jake donnant des leçons de vol à l'oiseau canadèche. Un pur moment de folie.
"Mais dès qu'il s'en approcha, elle se mit d'un bond sur ses pattes, claquant du bec comme un furie, sur un air de castagnettes. Elle jeta à Pépé Jake un regard terrible, puis elle chargea. Jake, protégeant ses gonades de ses deux mains en coquille, prit le plus court chemin pour regagner la galerie .. il ne fut pas assez rapide. Canadèche le toucha à la manière d'un boulet de canon, nettement en dessous de sa ligne de flottaison."
Bref, à lire absolument. Je louche maintenant vers un roman de l'auteur paru récemment en 10/18 "Stone junction".
Merci Cathulu. Et merci à Dominique, la première tentatrice.
Le billet de Cuné
Jim Dodge - L'oiseau canadèche - 119 pages
Editions Cambourakis - 2010