Le lagon noir
"Erlendur et Marion s'installèrent à une table isolée. Le plat du jour était de la raie faisandée à la graisse de mouton fondue. Marion craignait que l'odeur du poisson, un mélange de moisissure et d'urine, n'imprègne ses vêtements. Erlendur ne s'en souciait guère et demanda à ce qu'on lui serve une bonne portion de raie bien aspergée de graisse, accompagnée d'une tranche de pain complet beurrée."
J'attends toujours avec impatience une nouvelle enquête d'Erlendur et je dois dire que celle-ci ne m'a pas déçue. Je devrais plutôt dire celles-ci puisqu'il y en a deux.
Nous sommes en 1979. Le cadavre d'un homme est découvert dans ce qui deviendra le très touristique lagon bleu. L'état de son corps laisse supposer qu'il a fait une chute vertigineuse. Il s'agit d'un ingénieur qui travaillait à la base militaire américaine de Keflavik. En ces temps de guerre froide, la présence de l'armée est diversement appréciée par les Islandais, il y a ceux qui mettent en avant les retombées économiques et ceux qui se sentent occupés. Erlendur ne cache pas son désaccord sur cette présence.
L'enquête va se révéler difficile, l'armée américaine refusant de coopérer avec la police islandaise. Or, les deux enquêteurs soupçonnent assez rapidement que l'homme a été assassiné sur la base, territoire auquel ils n'ont pas accès. Par chance, ils réussiront à se faire aider par une policière américaine.
En parallèle, Erlendur s'intéresse à la disparition d'une jeune fille, quarante ans plus tôt, sur le chemin de l'école. Personne n'a jamais trouvé le moindre indice et déjà obsédé par les disparitions mystérieuses, il va repartir des maigres éléments en sa possession pour tenter de comprendre ce qui a pu se passer.
Chronologiquement, cet épisode se situe après "Les nuits de Reykjavik". Erlendur a donc intégré la brigade d'enquêtes criminelles sous les ordres de Marion Briem. C'est un jeune flic pas encore désabusé, mais déjà solitaire. De sa vie privée, nous saurons seulement qu'il vient de divorcer et qu'il va observer sa petite fille en catimini.
C'est parfois un peu déroutant de repartir en arrière avec tout ce que nous savons d'Erlendur en homme mûr. Là, ce sont ses années de formation, il observe, apprend, fait déjà preuve de ténacité et d'empathie. Il prend le temps de suivre toutes les pistes et d'y revenir inlassablement, jusqu'à un final saisissant.
J'attends déjà le suivant ...
L'avis de Keisha
Arnarldur Indridason - Le lagon noir - 320 pages
Traduit par Eric Boury
Editions Métailié - 2016