"Un dimanche en province. Un homme tranquillement assis sur sa galerie devant une large table couverte de livres, tous ouverts. Il était penché vers eux, comme devant un buffet riche et varié. Ce gourmand passait d'un livre à un autre avec la même excitation. Rien ne semblait exister autour de lui, à part ces mets appétissants. Il semblait si loin de nous, si hors de notre portée - nous pouvions le voir mais il était visiblement ailleurs. Ma grand-mère m'a alors glissé à l'oreille : "c'est un lecteur !". Et j'ai tout de suite pensé : c'est ce que je ferai plus tard. Je serai un lecteur".
C'est ma première lecture de l'auteur et je suis assez déroutée, ce n'est pas l'idée que je m'en faisais. Au début, le narrateur, pressé par son éditeur, annonce le titre de son prochain livre "je suis un écrivain japonais". A part cette lumineuse inspiration, rien ne suit et pourtant le roman qui n'existe pas encore se met à intéresser beaucoup de monde, à commencer par l'ambassade japonaise. Un roman qui parle du Japon ne risque-t'il pas d'entacher son image ? Ils vont donc essayer d'en savoir plus sur ce mystérieux écrivain.
Je suis assez embarrassée pour raconter la suite, la narration part dans tous les sens, suit des pistes, les abandonne, revient en arrière. Bien sûr il est question d'identité, d'exil. A quel pays appartenons-nous, celui qui nous a vu naître, celui où nous vivons au moment présent ? Questionnement encore plus aïgu chez un écrivain qui a lui-même quitté son pays et peut endosser toutes les nationalités par le seul pouvoir de l'imagination.
Ce qui est frustrant c'est que certains passages laissent entrevoir ce que le roman aurait pu être, l'écriture est aisée et a des fulgurances, je pense notamment à l'évocation d'un voyage de Basho où mon intérêt s'est subitement réveillé. Mais il y a aussi des longueurs, lorsque l'écrivain, habitant à Montréal, se met à fréquenter une bande de jeunes filles gravitant autour de Midori, pour en apprendre plus sur la mentalité japonaise. J'avoue que les démêlés de ces groupies ne m'ont guère intéressée.
C'est une déception, en dépit de l'humour, de l'écriture, de la réflexion. Je n'ai pas réussi à entrer véritablement dans ce roman. Je redonnerai cependant une chance à l'auteur.
C'est un partenariat avec que je remercie.
L'avis de l'Irrégulière
Dany Laferrière - Je suis un écrivain japonais - 212 pages
Le Livre de Poche - 2012